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janvier 2012, par
Auteur correspondant : Email : mamadoubeye chez yahoo.fr
Ces deux dernières décennies, si l’anesthésie a connu des progrès majeurs c’est certainement en anesthésie locorégionale que ces derniers sont les plus parlants et les plus importants en termes d’efficacité et de sécurité pour les patients. L’anesthésie locorégionale quel que soit le type (périmédullaire et périphérique), a bénéficié des progrès réalisés par l’industrie pharmaceutique sur la tolérance des produits utilisés avec une réduction considérable des accidents de toxicité locale ou systémique. Les blocs nerveux périphériques réalisés avec beaucoup de tâtonnement anatomique au début, avec des techniques réalisées à l’aveugle à l’origine de complications neurologiques très fréquentes, sont devenus aujourd’hui un gold standard dans la pratique de l’anesthésie surtout dans les pays développés.
Dans les pays en développement, précisément en Afrique, l’anesthésie locorégionale est pratiquée de façon très importante et les techniques périmédullaires sont prédominantes avec la rachianesthésie essentiellement [1]. Cette dernière est très utilisée en obstétrique, elle permet d’éviter les accidents liés à l’intubation difficile chez la femme enceinte et le risque de syndrome de Mendelson le plus souvent mortel.Cependant, elle expose le plus souvent à une hypotension artérielle chez la mère et à une baisse de la perfusion utéro-placentaire. Une réduction des doses d’anesthésique local est donc un impératif, associée à d’autres mesures pharmacologiques ou pas [2].
La neurostimulation est venue réhabiliter il y a une vingtaine d’années les techniques d’anesthésie locorégionale avec ainsi un risque d’agression nerveuse faible si les règles de bonnes pratiques et de sécurité sont respectées [3]. L’engouement pour l’anesthésie locorégionale périphérique est alors grandissant.Sa place dans la gestion de la douleur aigue et dans la prévention de la douleur chronique est devenue indiscutable. Ainsi l’anesthésie locorégionale a pris une place grandissante dans les protocoles d’analgésie multimodale. Associée à l’anesthésie générale, elle contribue à la réduction de la douleur postopératoire et des complications postopératoires (dans la chirurgie majeure, abdominale, thoracique et même périphérique) conférant ainsi une meilleure réhabilitation postopératoire et une réduction importante de la fréquence des douleurs chroniques post-chirurgicales [4].
L’introduction de l’échographie il ya quelques années, a permis de repenser toutes les techniques d’anesthésie locorégionale, de « redécouvrir » même certains blocs anciens qui ont été abandonnés (c’est le cas du TAP bloc), avec une réduction des échecs liés aux variations anatomiques mais également à la diffusion imprévisible des anesthésiques locaux [5]. L’anesthésie locorégionale échoguidée est devenue en tout cas un gold standard mais son association à la neurostimulation reste recommandée par l’ESRA (European Society of Regional Anesthesia). Très récemment la Société Française d’Anesthésie Réanimation (SFAR) a publié des recommandations formalisées d’experts sur l’échographie en anesthésie locorégionale qui vient compléter celles de 2002 sur les blocs périphériques des membres chez l’adulte et celles de 2006 sur les blocs périmédullaires [6]. Ce texte passe en revue les règles générales d’apprentissage, les procédures de réalisation, les aspects matériels, les règles de sécurité et d’hygiène et les types de blocs échoguidés réalisés au niveau des membres et ceux réalisés au niveau du tronc. L’ALR échoguidée assure un meilleur confort pour le patient, une courbe d’apprentissage beaucoup plus rapide pour les praticiens, un risque d’accidents beaucoup plus faible de par la visualisation directe des structures et même par l’utilisation de doses d’anesthésiques beaucoup plus petites avec des temps d’induction plus courts [7].
L’anesthésie locorégionale périphérique est encore en balbutiement du fait des coûts élevés liés aux consommables et surtout de leur non disponibilité dans beaucoup de pays d’Afrique Sub-saharienne. A Dakar, elle représentait environ 18% de l’activité anesthésique dans les CHU il ya cinq à six ans [1]. Mais ce chiffre est nettement plus important actuellement et ceci dans tous les centres de la sous-région. Nous, praticiens anesthésistes dans ces pays avons un rôle historique à jouer dans le développement de toutes les techniques d’anesthésie locorégionale et un plaidoyer auprès des autorités qui doivent investir dans l’achat de neurostimulateurs, d’appareils d’échographie et surtout de consommables (aiguilles de stimulation à biseau court, anesthésiques locaux de moindre toxicité, cathéters périnerveux). Car si on regarde de plus près les coûts de l’anesthésie locorégionale sont de loin inférieurs à ceux de l’anesthésie générale, et en plus les patients sont parfois demandeurs. Depuis dix ans, le thème qui a été le plus traité aux différents congrès de la SARANF, est l’anesthésie locorégionale périphérique essentiellement par l’intermédiaire d’ateliers pratiques au bloc opératoire. Même si une formation « diplômante » en anesthésie locorégionale parait prématurée vu le nombre encore très faible de médecins anesthésistes réanimateurs dans nos pays, une formation obligatoire en anesthésie locorégionale dans les cursus existants pourrait être une alternative et constituer un exemple de coopération entre les pays membres de la SARANF, les pays du Maghreb et avec d’autres pays du nord, la France principalement par l’intermédiaire du comité de solidarité scientifique de la SFAR.