Introduction
Selon Merger, l’accouchement prématuré est l’accouchement qui se produit entre 6 mois et 8 mois et 1/2, c’est-à-dire entre la 28e et la fin de la 37e semaine d’aménorrhée [1]. Les progrès de la néonatologie ont permis d’abaisser la limite inférieure de la prématurité à 24 voire à 22 semaines d’aménorrhée. Ainsi donc pour l’Organisation Mondiale de la Santé, l’accouchement prématuré est l’expulsion d’un produit de conception pesant au moins 500 grammes et manifestant des signes de vie. Si le poids est inconnu, on retient un âge gestationnel ≥ 22 SA ou une taille ≥ 25 cm [2]. La prématurité pose un problème de santé publique de par sa fréquence. A la Clinique Universitaire de Gynécologie Obstétrique (CUGO) du Centre National Hospitalier et Universitaire Hubert Koutoukou Maga (CNHU-HKM) la fréquence des accouchements prématurés était de 9,5% en 2005. Cette prématurité entrainerait une mortalité périnatale 20 fois supérieure à celle des enfants nés à terme. Il importe alors d’éviter la prématurité par une prise en charge adéquate des menaces d’accouchement prématuré (MAP) dans des conditions qui entrainent d’effets secondaires pour la mère et le fœtus. La prévention de l’accouchement prématuré est au premier rang des préoccupations de l’obstétricien, l’avenir des prématurés étant compromis comme l’indiquent Takpara I. et all. qui rapportent que les causes de morbi-mortalité néonatale étaient dominées par la prématurité dans 48% des cas. Cette prévention passe par le dépistage des patientes à risque d’accouchement prématuré et la prise en charge de la menace d’accouchement prématuré [3]. La menace d’accouchement prématuré dans 62,6% des cas, est l’une des principales causes d’hospitalisation au cours de la grossesse selon Randriambololona D. et all. à Madagascar, et conduit à un accouchement prématuré dans près de 50 % des cas [4]. Dans la prise en charge de la menace d’accouchement prématuré vient au premier plan la tocolyse qui est un traitement visant à diminuer ou arrêter les contractions utérines avec pour objectif de prolonger la grossesse afin de limiter les conséquences de la prématurité en termes de mortalité et de morbidité néonatale. Les tocolytiques les plus couramment utilisés sont les bêtamimétiques (salbutamol), les antagonistes de l’ocytocine (atosiban) et les inhibiteurs calciques (nifédipine et nicardipine). Le choix de l’arsenal thérapeutique, dans le souci d’un traitement peu couteux s’est tourné vers les inhibiteurs calciques (nifédipine et nicardipine) qui ne possèdent pas d’autorisation de mise sur le marché (AMM) pour le traitement de la MAP mais leur efficacité tocolytique a été démontrée par plusieurs essais randomisés [18,21,22]. Dans ce contexte, il nous paraît opportun d’étudier dans notre milieu tropical, l’efficacité des inhibiteurs calciques et des bêtamimétiques dans la prise en charge des MAP. Ces molécules sont utilisées à la CUGO depuis 2006 dans cette indication mais aucune étude n’a effectué une mise au point sur leur tolérance. L’objectif était de comparer l’efficacité des bêtamimétiques (salbutamol) et des anticalciques (nifédipine et nicardipine) dans la tocolyse des menaces d’accouchement prématuré.
Patientes et méthode
Il s’agissait d’une étude analytique d’observation avec collecte de données prospective. Elle est étalée sur une période de un an (du 01 Janvier 2012 au 31 Décembre 2012). La population d’étude était constituée de toutes les gestantes admises à la CUGO pour menace d’accouchement prématuré et ayant bénéficié d’une tocolyse à la nicardipine, à la nifédipine ou au salbutamol. Toutes les gestantes présentant des contractions utérines avec modification du col sur un terme entre 28 SA et 36 SA + 06 jours pendant la période d’étude et ayant donné leur consentement éclairé étaient incluses. Il s’agit d’un échantillonnage exhaustif. L’ordre d’administration des tocolytiques a été choisi de façon arbitraire. Ainsi la première gestante était tocolysée avec la nicardipine, la seconde avec la nifédipine et la troisième avec le salbutamol. Si une gestante présentait une contre-indication à la molécule qui devait lui être utilisée, on changait de molécule et la gestante n’était plus incluse dans l’étude. Celle qui présentait des effets indésirables à l’une ou l’autre des molécules l’arrêtait et la remplaçait par une autre de notre choix. Le traitement tocolytique était considéré comme une réussite en absence d’accouchement prématuré dans les 48 heures qui suivaient le début du traitement sans changement de molécule. Il est considéré comme un échec s’il y a persistance des contractions utérines au-delà ou un accouchement prématuré avant les 48 heures. Comme outils de collecte, nous avions utilisé : la fiche d’enquête, la fiche du score de Baumgarten et la fiche de Coefficient de Risque d’Accouchement Prématuré (CRAP). Dans un premier temps, les patientes admises pour menace d’accouchement prématuré étaient recensées au fur et à mesure avec en mention le numéro de dossier et les informations obtenues à l’examen initial. Dans un second temps, nous prenions les dossiers des malades concernées pour recueillir les informations utiles relatives à l’examen de la 48ème heure et après accouchement. Les différentes données étaient saisies sur ordinateur puis analysées à l’aide des logiciels EPI INFO et SPSS. Pour la comparaison des variables qualitatives nous avions utilisé les tests statistiques de Khi carré de Pearson, le test de khi2 corrigé ou encore le test exact de Fisher. Pour les variables numériques nous avions procédé à une analyse des variances. Les tests statistiques des résultats étaient effectués au seuil alpha égal à 0.05 que nous avions considéré comme statistiquement significatif. Au total, 198 gestantes étaient recensées. Toutes les gestantes entrant dans notre étude avaient reçu chacune un formulaire de consentement. Pour celles qui n’étaient pas instruites, il leur était expliqué les risques encourus. Tout au long de notre étude le respect des valeurs, de la pudeur, des droits et lois propres à l’individu étaient observés. L’anonymat était respecté et Il n’existait pas de conflit d’intérêt
Résultats
La tranche d’âge de 26-30 ans était la plus représentée. La moyenne d’âge était de 28,75 ans avec des extrêmes de 17 ans et de 39 ans. Les multigestes et les paucigestes représentaient la plus grande proportion de notre échantillon avec respectivement 43,93% et 40,90%. Les paucipares et les primipares étaient respectivement représentés par 39,4% et 25,8%. La majorité de notre population d’étude était constituée de fonctionnaires (34,8%), de ménagères (10,6%) puis l’ensemble des revendeuses, des élèves et étudiantes et des artisanes représentaient 54,6%. Les drépanocytaires faisaient 4,5% des cas et les gestantes séropositives au VIH étaient à 7,6%. Il y avait 27,3% de cas d’antécédent d’avortement tardif et 21,2% avec des antécédents d’accouchement prématuré. De notre population 34,8%, avaient fait moins de 3 consultations prénatales.
De nos 198 patientes, 51,5% (n=102) avaient un âge gestationnel compris entre 32SA+1jr et 34 SA et 37,9% (n=75) entre 28 et 32 SA. Chez 51 gestantes soit 25,8%, il s’agissait d’une grossesse gémellaire. Dans le groupe de la nicardipine, 40,9% (n=27) avaient un CRAP appréciable et 18,2% (n=12) un CRAP grave. Dans le groupe de la nifédipine, 45,5% (n=30) avaient un CRAP appréciable et 13,6% (n=09) un CRAP grave. Dans le groupe du salbutamol, 50% (n=33) avaient un CRAP appréciable (tableau I).