Résumé
Introduction : Soulager la douleur constitue l’une des missions des médecins, soignants et administratifs. Après avoir constaté beaucoup d’insuffisance du traitement de la douleur chez les patients opérés, nous avons initié ce travail dont le but était d’évaluer les pratiques dans le domaine de la prise en charge de la DPO au Sénégal, afin de déterminer les moyens à mettre en oeuvre pour améliorer la qualité des soins.
Matériel et méthodes : Un questionnaire anonyme destiné au personnel médical et paramédical a été envoyé dans différents établissements publics de santé où existe une activité chirurgicale au Sénégal. Ce questionnaire est tiré d’un outil d’évaluation proposé par un groupe d’expert de la SOFRED (Société francophone d’étude de la douleur) et d’Epicentre (groupe d’expertise européen). (Ann Fr Anesth Réanim 2002 ; 21 :276-94).Les données descriptives sont exprimées en moyenne avec écart-type et l’analyse multivariée effectuée par le test du x².
Résultats : Au total, 393 questionnaires ont été remplis. Les réponses aux questions ont permis d’évaluer certains paramètres
– Outils d’évaluation : EVA : 14,2%, EVS : 46,8%, EN : 2,5%
– Motif de non évaluation : manque de formation (37,2%), non disponibilité des antalgiques (8,4%), manque de sensibilisation (11,5%), autre (5,1%).
– Qui prescrit l’analgésie ? : l’anesthésiste (28%), le chirurgien (26%), les deux (43%).
– Administration d’antalgiques systématique : 74,6%.
– Modalités de prescription : protocole standard (27,5%), selon les habitudes (62,8%).
– Début de l’analgésie : bloc (25,4%), SSPI (48,3%), hospitalisation (21,1%).
– Evaluation de l’efficacité du traitement antalgique : 46,3%.
– Recherche des effets secondaires : 43,5%.
– Protocole de surveillance des traitements : 14,8%.
– Produits utilisés : AINS (70,5%), propacétamol (92,2%), paracétamol (59,8%), anesthésiques locaux (23,7%), tramadol (21,9%), morphine (19,8%).
Conclusion : Cette étude confirme les insuffisances du traitement de la douleur post-opératoire au Sénégal. Les difficultés sont liées au manque de formation, de disponibilité des antalgiques mais aussi à l’absence de stratégie adéquate. Il est donc urgent de mettre en place des protocoles d’analgésie post-opératoire avec des moyens adaptés pour un soulagement optimal de la douleur.
Mot-clés : évaluation – connaissance- Douleur postopératoire – Sénégal
Introduction
La douleur postopératoire et sa prise en charge représentent des problèmes de santé publique. En Europe, ce sujet fait l’objet de nombreux travaux qui insistent sur la nécessité de traiter la douleur et d’évaluer les pratiques. Cependant, malgré les progrès réalisés dans la compréhension des mécanismes de la douleur et dans les techniques analgésiques, malgré les multiples recommandations faites par les sociétés savantes de nombreux pays la DPO est insuffisamment prise en charge [6, 9],. En Afrique et dans les pays en développement, la douleur a longtemps été considérée comme une fatalité et la prise en charge de la douleur post opératoire est encore inadéquate.
L’objectif de notre travail était d’évaluer les pratiques dans le domaine de la prise en charge de la DPO au Sénégal et de proposer des recommandations pour une prise en charge adaptée.
Matériel et méthodes
Nous avons mené une enquête sous forme de questionnaires au courant du mois de Décembre 2003. Un questionnaire anonyme a été envoyé dans différents établissements publics de santé où existe une activité chirurgicale au Sénégal. Il s’agit à Dakar du CHU Aristide Le Dantec, l’hôpital Principal, l’hôpital Général de Grand Yoff, du Centre Hospitalier Abass Ndao, du Centre de Santé Roi Baudouin de Guédiawaye, et dans les Hôpitaux Régionaux de Thiès, Kaolack, Louga, Tambacounda, Kolda, Diourbel, Ziguinchor, Ndioum, et Saint-Louis.
Ce questionnaire est tiré d’un outil d’évaluation proposé par un groupe d’expert de la SOFRED (Société francophone d’étude de la douleur) et d’Epicentre (groupe d’expertise européen). Le but de cet outil d’évaluation était d’établir les points de dysfonctionnement existant dans l’organisation de la prise en charge des douleurs post-opératoires et pouvant expliquer son insuffisance [10]. Les différentes questions avaient pour but d’évaluer les pratiques des médecins et des différents soignants dans le domaine de la DPO. Etaient concernés tout le personnel médical et paramédical exerçant dans les spécialités suivantes : anesthésie-réanimation, orthopédie-traumatologie, chirurgie viscérale, cancérologie, ORL, ophtalmologie, chirurgie pédiatrique, urologie, neurochirurgie, chirurgie thoracique et cardiovasculaire, gynécologie obstétrique. Le questionnaire a été distribué à tout le personnel soignant présent dans les différents services au moment de l’étude
Les données descriptives sont exprimées en moyenne avec écart-type et l’analyse multi variée effectuée par le test du x² avec un seuil de signification à p <0,05.
II- Résultats
Le nombre de questionnaires était de 393.
II.1 Répartition des praticiens
II.1.1 Selon la fonction
La répartition des praticiens selon la fonction est représentée dans le tableau I.
II.1.2 Selon la structure
La répartition des praticiens selon la structure est représentée dans le tableau II.
II.2 Répartition selon les questions
II.2.1 Connaissez-vous les différents scores de la douleur ?
Les réponses à cette question sont représentées sur le tableau III
II.2.2.Evaluez-vous la douleur en postopératoire ?
Deux cent vingt-cinq praticiens soit 57,3% ont déclaré évaluer la DPO (P=0,0037).
II.2.3 Quelle méthode d’évaluation utilisez-vous ?
La méthode dévaluation la plus utilisée était l’EVS à 46,8%, suivie par l’EVA (14.2%) ; l’EN était la moins employée (2.5%).
II.2.4 Avez-vous reçu une formation pour la prise en charge de la DPO ?
Seuls 26,2% des praticiens ont déclaré avoir reçu une formation sur la prise en charge de la douleur.
II.2.5 Pourquoi n’évaluez-vous pas la douleur ?
Trois motifs étaient évoqués à l’absence d’évaluation de la douleur : le manque de formation (37,2%), le manque de sensibilisation (11,5%), la non disponibilité des antalgiques (8,4%) et les autres motifs (5,1%).
II.2.6 Qui prescrit l’analgésie post opératoire ?
Selon 28% des soignants, la prescription antalgique était effectuée par les anesthésistes, pour 26%, par les chirurgiens. Par contre pour 168 soignants, soit 42% cette prescription relevait d’une compétence commune entre anesthésiste-réanimateurs et chirurgiens. Dans 4%, la réponse n’était pas précisée.
II .2.7 L’administration d’antalgique est-elle systématique en post opératoire ?
Selon 74,6% des praticiens, l’administration d’antalgiques en postopératoire était systématique.
II .2 .8 Modalités de prescription
Pour 108 praticiens soit 27,5% la prescription des antalgiques se faisait selon un protocole standard, alors que pour 62,8% la prescription se faisait selon les habitudes.
II .2. 9. A quel moment est débutée l’analgésie post-opératoire ?
Le début de l’analgésie se faisait généralement en salle de réveil selon 48,3% des agents, au bloc opératoire pour 25,4% et en hospitalisation pour 21,1%.
II .2 10 Quelles sont les méthodes d’analgésie utilisées ?
L’analgésie par voie systémique était la plus utilisée : IV (90,3%), IM (37,2%), orale (37,2%), SC (9,6%), rectale (33,1%) ; pour l’anesthésie locorégionale, il s’agissait essentiellement de la péridurale (20,4%), de la rachianesthésie (12,7%) et des infiltrations (5,6%) ; les blocs périphériques n’ont pas été évalués.
II .2 11 Surveillance du traitement analgésique
Dans ce cadre, 3 paramètres étaient étudiés : l’évaluation de l’efficacité du traitement antalgique était réalisée par 46,3% des soignants, la recherche des effets secondaires par 43,5% et l’utilisation d’un protocole de surveillance par 14,8%.
II .2 12 Produits utilisés
Les différents antalgiques utilisés étaient :
Le paracétamol (propacétamol : 92,6% ; paracétamol per os : 59,8%), les AINS : 70,5%, le tramadol : 21,9%, la morphine : 19,8%, les agoniste-antagonistes : 11,2%, les anesthésiques locaux : 23,7%.
II.3.Répartition des réponses selon la fonction
II .3 .1 Connaissance des scores, évaluation de la douleur, méthodes d’évaluation.
Parmi les soignants, les anesthésistes-réanimateurs connaissaient le mieux les scores de la douleur, mais ce sont les gynécologues-obstétriciens qui évaluaient le plus souvent la douleur avec un pourcentage estimé à 78,6%. L’EVS était plus utilisée par les gynécologues obstétriciens, les anesthésiste-réanimateurs et les techniciens supérieurs. Le pourcentage d’utilisation de l’EVA était plus élevé chez les internes et CES en anesthésie-réanimation, suivis par les gynécologues obstétriciens.
Le tableau IV représente les réponses des praticiens sur la connaissance des scores, l’évaluation de la douleur post-opératoire et les méthodes d’évaluation utilisées.
II.3.2 Avez-vous reçu une formation pour la prise en charge de la douleur post-opératoire ?
Parmi le personnel, les anesthésiste-réanimateurs représentaient la branche la mieux formée (81,30%), suivis par les internes en anesthésie-réanimation (69,2%), les techniciens supérieurs (56%), les gynécologues-obstétriciens (21,4%), les internes en chirurgie (20%), les sages-femmes (14,5%), les infirmiers (14%), les chirurgiens (13,6%), les internes en gynéco-obstétrique (7,7%), P = 0,0000.
II. 3. 3 Pourquoi n’évaluez-vous pas la douleur ?
II.3.4 Modalités de prescription
Les anesthésistes-réanimateurs disposaient d’un protocole standard dans 62,5% alors que 93,2% des chirurgiens et 71,4% des gynécologues obstétriciens prescrivaient selon les habitudes.
II.3 .5 Surveillance du traitement antalgique
Les modalités de surveillance selon la fonction sont représentées sur le tableau VII
DISCUSSION
Nous avons exploité tous les questionnaires remplis, ce qui a permis d’évaluer le pourcentage de répondeurs par structure. Le nombre de répondeurs dans certaines structures reflétait bien leur situation aussi bien géographique qu’en termes d’effectif. C’est le cas de l’HALD avec 170 répondeurs. Par contre pour l’HPD, paradoxalement nous n’avons eu que 24 répondeurs principalement constitués par le personnel du département d’anesthésie-réanimation. Ce phénomène a été retrouvé au cours d’une enquête réalisée par Langlade en 2002, dans des services de chirurgie de trois établissements de santé français (A, B, C) : dans les établissements A et B, plus de 50 % du personnel (infirmier ou médical) avaient répondu aux questionnaires, permettant de considérer que les résultats obtenus reflétaient la situation du service. Dans l’établissement C, le taux des répondeurs a été plus faible [10].
Selon les réponses, 39,2% des soignants connaissaient les scores de la douleur. Parmi ces soignants les anesthésistes-réanimateurs connaissaient le mieux les scores de la douleur. Ces résultats semblent confirmer le fait que les questionnaires distribués n’ont été remplis la plupart du temps que par les anesthésistes-réanimateurs dans certains hôpitaux.
Sur le plan de l’évaluation de la douleur postopératoire, 57,3% des praticiens déclaraient évaluer la douleur. Nos résultats sont proches de ceux de Langlade selon qui l’évaluation des douleurs postopératoires était insuffisante dans les 3 établissements ; elle n’était pas réalisée pour tous les patients [10]. A l’inverse, une enquête européenne sur la prise en charge de la douleur et de l’analgésie postopératoires en 2005 a montré que la douleur postopératoire était évaluée au moins une fois par jour dans 82 % des établissements ayant répondu et plusieurs fois par jour dans 65 % d’entre eux.[5].
La méthode dévaluation la plus utilisée était l’échelle verbale simple (EVS) suivie par l’échelle visuelle analogique (EVA). L’échelle numérique (EN) était la moins employée. L’EVA quoique étant l’outil de référence d’évaluation de la douleur à travers le monde, voit son utilisation compromise par l’absence de formation continue du personnel à l’utilisation de la réglette d’EVA. Ces résultats sont proches de ceux retrouvés par Langlade, où l’interrogatoire simple était pratiqué par plus de 50 % des soignants, les échelles d’autoévaluation de l’intensité de la douleur étaient encore très peu utilisées, l’EN n’était pratiquement pas employée, moins de 30 % des soignants se servaient de l’EVS et moins de 50 % des soignants utilisaient l’EVA [10]. Un audit de la gestion de la douleur postopératoire dans le cadre d’une démarche qualité, en chirurgie orthopédique réalisé en 1999 dans un établissement privé a montré que 100 % des patients étaient surveillés grâce aux EVA ou EVS toutes les 4 h au moins, et que toutes les données de la surveillance effectuée et les traitements administrés étaient reportés sur la feuille de surveillance infirmière, et/ou la fiche « analgésie ». Contrairement à notre étude, toutes les infirmières utilisaient les échelles d’évaluation, 77 % utilisaient les EVA et les 33 % restant, une autre méthode unidimensionnelle type EVS ou EN [2].
Globalement, la formation du personnel sur la DPO, estimée à 26,2%, était très insuffisante. Ainsi, comme motif de l’absence d’évaluation de la douleur, le manque de formation venait en tête. Le problème de sensibilisation n’était que la conséquence d’un défaut d’organisation quant à la prise en charge de la DPO. La non disponibilité des antalgiques, cause indépendante du personnel, relevait pour la plupart du temps des ressources spécifiques de chaque établissement.
Parmi ce personnel, les anesthésistes-réanimateurs représentaient la branche la mieux formée suivis des techniciens supérieurs, alors que l’absence de formation était plus profondément ressentie chez les sages-femmes et les infirmiers. Ces résultats divergent un peu de ceux retrouvés dans l’enquête européenne, où 30 % des établissements assuraient une formation régulière aux anesthésistes-réanimateurs, 6 % aux chirurgiens, 57 % aux infirmières de salle de réveil et 63 % aux infirmières des services d’hospitalisation, et 6 % assuraient une formation régulière à l’ensemble des quatre catégories de personnels sus-cités.
Le bilan des effets d’une démarche qualité sur la gestion de la DPO entre deux audits, a montré que la majorité des médecins estimaient leur formation suffisante pour faire face à la DPO : 79 % en 2003 et 74 % en 1998. Néanmoins, seuls les internes de chirurgie ont bénéficié d’une formation ponctuelle, non renouvelée malgré leur rotation. Rien n’a été mis en place pour les chefs de clinique et les seniors, anesthésistes ou chirurgiens [7].
Pour 42,7% des soignants, cette prescription était réalisée à la fois par les anesthésistes-réanimateurs et les chirurgiens. Ceci est également retrouvé en Allemagne, en Espagne et en Suisse où la responsabilité de l’analgésie périopératoire est prise à égalité par anesthésistes et chirurgiens, alors qu’en France, en Belgique et au Portugal, la totalité des questionnaires a été remplie par des anesthésistes-réanimateurs [5]. En effet la prise en charge de la douleur est quasi exclusivement dirigée par les anesthésistes-réanimateurs en France, par comparaison aux pays dans lesquels les équipes chirurgicales jouent un rôle dominant, y compris au cours des 24 premières heures postopératoires [4].
L’administration d’antalgiques en postopératoire se faisait de façon systématique la plupart du temps selon les habitudes, selon un protocole standard chez seulement 27,5% des soignants. Cependant ces protocoles d’analgésie n’ont pas été précisés dans notre questionnaire ; les modalités d’administration analgésique dépendaient surtout des produits antalgiques disponibles et de la formation du personnel à l’utilisation des différentes méthodes analgésiques. Dans l’étude de Langlade, les protocoles antalgiques n’étaient pas connus par l’ensemble du personnel soignant, témoignant d’un manque d’information au sein des services enquêtés [10].
Dans l’enquête européenne, on retrouvait des protocoles thérapeutiques pour tous les types de chirurgie dans 36 % des établissements répondants et ces derniers admettaient que ces protocoles étaient appliqués chez 35 % uniquement des patients [5]. En effet, la disponibilité de protocoles écrits restait très insuffisante et, lorsqu’ils existaient, ils restaient insuffisamment appliqués : 20 % des structures ne disposaient en effet d’aucun protocole d’analgésie et, inversement, seuls 35 % d’entre eux utilisaient systématiquement la procédure commune [1].
D’après nos résultats, le début de l’analgésie se faisait en salle de réveil selon 48,3% des soignants, alors que dans l’enquête de Langlade, plus de 90 % des soignants rapportaient que le traitement antalgique avait débuté systématiquement en salle de surveillance postinterventionnelle [10]. Le traitement de la douleur doit être le plus précoce possible et compte tenu des données pharmacocinétiques de chaque molécule, il est recommandé d’administrer les antalgiques non morphiniques avec anticipation, c’est-à-dire, en fin d’intervention ou avant la levée du bloc sensitif d’une anesthésie locorégionale [3].
Pour la surveillance du traitement antalgique, la recherche de l’efficacité du traitement antalgique administré était surtout réalisée par le personnel paramédical. En effet dans la majorité des études, l’infirmière occupe un poste clé dans la pyramide de la prise en charge de la DPO [8] ; elle passe le plus de temps au chevet du patient, dès la fin de l’intervention et se trouve être la première interlocutrice du patient à son réveil. La recherche des effets secondaires semblait être l’apanage des anesthésistes-réanimateurs, certainement parce qu’ils sont les premiers prescripteurs de l’administration du traitement antalgique en postopératoire et donc responsables de la prise en charge des effets secondaires lorsqu’ils surviennent. L’évaluation à court et moyen termes de l’impact d’un contrat d’assurance qualité pour la prise en charge de la douleur postopératoire dans un CHU a montré qu’en 2003, 86 % des médecins connaissaient le traitement des effets indésirables, versus 29 % en 1998 (p < 0,0001) ; dans la même étude, en 2003, 57 % des paramédicaux recherchaient ces effets indésirables, contre seulement 11 % en 1998 (p < 0,001) [7].
L’analgésie par voie systémique était la plus utilisée en particulier la voie intraveineuse par ; pour l’anesthésie locorégionale, il s’agissait essentiellement de la péridurale et de la rachianesthésie. Il ressort d’après nos résultats que le paracétamol injectable était le produit le plus utilisé par les soignants suivi par les anti-inflammatoires non stéroïdiens. Ceci est dû au fait que ces produits sont les plus disponibles, et les plus faciles à manier. La morphine est utilisée dans 19,8% des cas préférentiellement par voie sous cutanée dans nos pratiques. Cette faible utilisation de la morphine a été retrouvée au cours de l’étude de Langlade qui rapportait qu’il persistait encore des craintes à l’égard des morphiniques et des anti-inflammatoires [10].
L’enquête PATHOS a également permis de mettre en évidence un taux d’utilisation élevé de l’analgésie locorégionale (ALR) après chirurgie majeure, orthopédique ou abdominale, contrastant ainsi avec des données antérieures [5]. Le recours plus fréquent à l’ALR révélé par ce travail suggère une évolution majeure par rapport aux enquêtes réalisées il y a environ dix ans, ce qui traduirait une maîtrise accrue de ces techniques.[12] En effet, pour les douleurs post opératoires fortes, il serait nécessaire de promouvoir l’utilisation de façon courante des techniques d’analgésie postopératoire réputées très efficaces comme les techniques d’analgésie locorégionale et l’analgésie contrôlée par le patient (PCA)[11]. Ces techniques sont peu utilisées dans nos structures par manque de moyens et défaut de formation.
CONCLUSION
Cette étude nous a permis de constater que la prise en charge de la DPO reste encore déficiente au Sénégal ; globalement la formation sur la DPO est très insuffisante et l’organisation inadéquate. Il semble que l’amélioration de l’analgésie postopératoire passe plus par un renforcement de la mise en place de recommandations et par l’évaluation régulière de leur impact que par le développement de techniques d’analgésie plus performantes. Cette organisation fait cruellement défaut dans nos structures. Ainsi, pour améliorer la prise en charge de la DPO nous formulons des recommandations pour la création d’un comité de lutte contre la douleur (CLUD). Ce CLUD aura pour mission, la mise en place d’un programme d’assurance qualité de prise en charge de la DPO comprenant l’information du patient, la formation du personnel, la réalisation de protocoles d’analgésie et le développement de thérapeutiques innovantes.
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