Introduction
Les corps étrangers (CE) laryngo-trachéaux sont très fréquents chez les enfants. C’est un motif de consultation en urgence. Il est évoqué devant une dyspnée laryngée d’installation brutale. L’interrogatoire retrouve une inhalation du corps étranger au cours d’un jeu et un syndrome de pénétration.
Nous voudrions vous présenter l’observation d’un nourrisson de 19 mois adressé pour la prise en charge d’un corps étranger laryngo-trachéal dans nos conditions de travail difficile. En discutant des possibilités thérapeutiques d’urgence et en préconisant des recommandations.
Observation
Il s’agit d’un nourrisson de 19 mois sans ATCD particuliers adresse par la pédiatrie pour une dyspnée d’installation brutale évoluant depuis 4 heures de temps donc la notion de syndrome de pénétration n’a pas pu être mis en évidence par les parents.Les parents consultent dans une formation sanitaire périphérique ou une radiographie cervico-thoracique est réalisé. Devant la persistance de la difficulté respiratoire les parents sont orientés aux urgences de pédiatrie qui nous le réfère après la réalisation d’une radiographie cervicale de profil. L’examen clinique a mis évidence un nourrisson hypotonique, somnolent, présentant une dyspnée inspiratoire, un stridor, battement des ailes du nez, tirage intercostal et sus sternal, un entonnoir xyphoïdien avec cyanose des extrémités. La fréquence cardiaque était de 144 batt/mn.Ailleurs l’examen ORL était sans particularités.Nous avons conclu à une dyspnée laryngée au stade 3-4. La radiographie cervicale de face et de profil réalisée par les pédiatres a mis en évidence un corps étranger radio-opaque projeté dans la filière laryngée à hauteur de C4 – C5. (Fig : 1 & 2).
L’indication d’une trachéotomie de sauvetage a été posée et celle-ci réalisée après une intubation orotrachéale. La laryngoscopie avant mise en place de la sonde d’intubation n’a pas permis de visualiser le corps étranger. L’évolution immédiate a été marquée par une reprise ventilatoire. Les suites opératoires post-trachéotomie on été marquées par la persistance de la dyspnée, et l’abolition du murmure vésiculaire dans le champ pulmonaire droit. La radiographie pulmonaire de contrôle a mis en évidence le corps étranger dans la bronche souche droite associé à un pneumothorax (Fig : 3).
En absence de bronchoscope pédiatrique dans les services, l’enfant a été transféré en chirurgie thoracique. Il a bénéficié d’une thoracotomie avec extraction du corps étranger (fig 4 et 5) et d’un drainage du pneumothorax. L’évolution a été favorable. (Fig : 6).
Discussion
Les corps étrangers(CE) laryngés sont très fréquents surtout chez les enfants et représentent 6,4 % des corps étrangers en ORL dans notre service [1]. Son diagnostic évoqué devant une dyspnée laryngée d’installation brutale [1,2], requiert une prise en charge urgente. Ainsi plusieurs possibilités thérapeutiques sont envisagées selon le lieu où on se trouve, la durée de l’accident d’inhalation, et le plateau technique [3]. Le but recherché est le rétablissement d’une ventilation normale. La manoeuvre de Heimlich est préconisée en cas d’asphyxie aiguë avant l’arrivée des secours médicalisés [4]. En milieu hospitalier non spécialisé la laryngoscopie est le premier geste réalisé en même temps que l’oxygénation. Cet examen peut visualiser le corps étranger et permettre son extraction sous contrôle de la vue à l’aide d’une pince de Magill. En l’absence de visualisation du CE, une intubation endotrachéale ou une trachéotomie s’impose. Le but est de reperméabiliser le plus rapidement possible la trachée en poussant le CE dans l’une des deux bronches souches [4]. Ce fut le cas de notre patient. La trachéotomie est le geste chirurgicale permettant de courtcircuiter l’obstacle en amont, doit être réalisée de préférence après intubation selon le degré de la dyspnée. L’intubation permet d’établir une oxygénation rapidement normale du patient et de réaliser la trachéotomie sans risque d’arrêt cardiorespiratoire hypoxique. L’extraction du CE sera faite secondairement. Dans l’étude de Vroh-bi et al [1], la trachéotomie a été réalisée chez 35,7 % des enfants avant l’extraction du CE. Cette trachéotomie était réaliséedans les cas de dyspnée sévère et de corps étrangers enclavés. Dans l’étude de Diop et al [5], 55,38 % des patients ont été trachéotomisés. Pour ces derniers auteurs la trachéotomie occupe une place centrale dans la prise en charge des corps étrangers laryngés dans les pays aux ressources médicales limitées [1]
La reconnaissance des difficultés respiratoires chez un nourrisson est fondamentale et ne pas hésiter à orienter ces enfants vers les services d’urgences ORL. La pratique des radiographies standards doit porter aussi bien sur le poumon que sur le rachis cervical devant une dyspnée chez un enfant sans cause évidente. En cas de détresse respiratoire sur CE, L’intubation doit être toujours envisagée en priorité [4].
Conclusion
Le corps étranger laryngé est une urgence médicale absolue qui met en jeu le pronostic vital par la gravité de la détresse respiratoire. La prise en charge en urgence vise à prévenir l’arrêt cardiorespiratoire hypoxémique d’où la place centrale de l’intubation d’abord puis la trachéotomie et secondairement l’extraction du corps étranger
Référence :
1. Vroh BTS, N’gattia KV, Kacouchia NB ; Les corps étrangers laryngés chez les enfants au Centre Hospitalieret Universitaire de Yopougon à propos de 14 cas. Rev. Col. Odonto-Stomatol. Afr. Chir. Maxillo-fac., 2011 ; 18 : 5-9
2. Y. Ouadnouni∗, A. Achir, M. Bouchikh. Un corps étranger trachéal : une présentation tardive Rev Pneumol. clinique 2010 ; 66 : 383-84
3. Marquettec-H, Martinot A. Corps étrangers des voies aériennes supérieures. r http://medecine.univ-lille2.
fr/pedagogie/contenu/mod-transv/module11/item193/coprsetranger-cours.pdf.
4. Granry J.C, Monrigal J.P, Dubin J., Preckel M P, Tesson B. corps étranger des voies aériennes. In conférences d’actualisation. 41ème Congrès SFAR 1999. Ed. Elsevier. P. 765-795.
5. Diop E, Tall A, Diouf R, Ndiayei. Corps étrangers laryngés : prise en charge chez l’enfant au Sénégal. Arch. Pediatr. 2000 ; 7 : 10-15